Les
Voyages d’Endymion – Endymion
« Vous
êtes en train de lire ceci pour de mauvaises raisons. Si vous lisez ces lignes
pour savoir quel effet cela fait de faire l'amour avec une messie – notre
messie – vous auriez tort de continuer, car vous n'êtes rien de plus qu'un
voyeur. Si vous les lisez parce que vous êtes un fan des Cantos du vieux poète
et que la curiosité vous dévore de savoir ce qui s'est passé ensuite dans la
vie des pèlerins d'Hypérion, vous risquez fort d'être déçu. J'ignore ce qui est
arrivé à la plupart d'entre eux. Ils ont vécu et sont morts environ trois
siècles avant ma naissance... » La chute du Retz
est déjà de l'histoire ancienne. Trois siècles se sont déjà écoulés depuis.
L'Eglise s'échine à maintenir un semblant de stabilité, alors que la guerre
contre les Extros fait rage. Les soldats de l'église attendent un événement
prévu depuis maintenant des centaines d'années: la venue d’Enée, la fille de
Brawne Lamia, doit sortir des tombeaux du temps. Et Enée est une menace pour la
Pax, le groupuscule armé de l'Eglise, et elle le sait: trente mille soldats
attendent la petite enfant à sa sortie. Il en sera ainsi: Raul Endymion sera la
dernière chance de la petite Enée, son seul espoir de survie. Il l'accompagnera
dans sa fuite à travers les portes distrans...
Les Voyages d’Endymion – Endymion
Auteur
: Dan Simmons
Type
d'ouvrage : Science-Fiction
Première
Parution : 20 septembre 1995
Edition
Poche : 01 septembre 2016
Titre
en vo : The Hyperion Cantos – Endymion
Pays
d’origine : Etats-Unis
Langue
d’origine : anglais
Traduction : Guy
Abadia
Editeur : Folio
SF
Nombre
de pages : 640
Mon
avis : Après avoir abordé, ces dernières
semaines, les deux ouvrages de Dan Simmons qui composent Les Cantos
d’Hypérion, je veux bien évidement parlé de Hypérion et
de La
Chute d’Hypérion, il est temps désormais de nous tourner vers la suite
de ce classique de la littérature fantastique, Les Voyages d’Endymion,
œuvre qui est, elle aussi, composé de deux titres, Endymion (ouvrage
qui nous préoccupe aujourd’hui) et L’Éveil d’Endymion. Bien
évidemment, et avant de voir ce que vaut cette fameuse suite, comment ne pas
s’attarder sur la problématique de, lorsque l’on tient un chef d’œuvre, devoir
lui donner ou non une suite ? Car, il y a de cela un peu plus de deux
décennies, voilà le problème où se trouvait Simmons : fort de son succès
colossal acquis avec les Cantos, il apparaissait comme risquer de
se hasarder a décevoir les fans en proposant une suite à un récit qui, en toute
franchise, pouvait se suffire a lui-même – en effet, la fin de La Chute
d’Hypérion est une véritable fin en soi et on pouvait parfaitement en
rester là. Surtout qu’il est de bonne guerre que, lorsqu’une œuvre remporte un
grand succès, une suite éventuelle à tendance à être bouder par le public,
forcément très critique que l’on revienne sur ce qu’il considère comme son
propre chef d’œuvre intouchable. Et puis, quelque part, écrire une suite
aux Cantos, c’était un peu comme si Tolkien, une fois Le
Seigneur des Anneaux achevé, lui aurait donné un « petit
frère » quelques temps plus tard ; vous imaginez ce
qu’auraient dit les fans ? Du coup, vous imaginez fort bien que, il y a
quelques années, la sortie d’Endymion, ne fit pas que des heureux…
Pourtant, avec du recul, il apparait depuis longtemps que Les Cantos
d’Hypérion ne se limitent pas uniquement aux deux premiers romans et
que l’œuvre, désormais, est indissociable de cette fameuse suite, de ces
pérégrinations de ce formidable antihéros qu’est Raul Endymion et de cette
messie à la fois attendue et redoutée, la fille de Brawne Lamia, Énée.
Pourtant, la cassure, ici, est belle et bien nette puisque, si l’univers reste
le même, si certains protagonistes sont encore présents – comme Martin Silenus,
l’androïde Bettik qui faisait une très courte apparition dans Hypérion,
mais aussi le père Hoyt, devenu Pape, ainsi que, bien entendu, le Gritche – et
si, très rapidement, le lecteur s’apercevra que certaines menaces que l’on
croyait écartées sont encore présentes, avec ce nouveau tome de la saga, Dan
Simmons va encore plus loin et change un peu la donne : en utilisant les
mêmes ficelles que précédemment puisque, une fois de plus, c’est vers les
œuvres du poète John Keats qu’il faut se tourner (lui aussi écrivit en son
temps un Endymion) et en rendant une fois de plus un superbe
hommage à la Science-Fiction dont il réussit une nouvelle fois a sublimer le
genre, l’auteur réussit le pari de, non seulement, réussir sa suite, mais qui
plus est, la rendre indispensable… ou presque. Car si les Cantos peuvent
se suffire à eux-mêmes, il serait dommageable pour le lecteur de ne pas
découvrir quel fut le destin de l’ex-Hégémonie, quel pouvoir pris sa place,
créant de fait un nouvel Empire Galactique, qu’advint-il du Technocentre, du
Gritche, des pèlerins mais aussi, et surtout, de passer à côté de ce qui
restera probablement comme l’un des plus réussis couples de la SF, je veux bien
évidement parler de Raul Endymion et Énée. Car si le coté messianique de cette
dernière, dans cet ouvrage, ne transparait pas encore de par son très jeune
âge, il en est tout autrement de cet impayable Endymion, antihéros, comme je
vous l’avais dit, décidément pas comme les autres. Car, en utilisant cette
dénomination si souvent utilisée à tort et à raison, suivant les cas, je ne
veux pas entendre par là que le protagoniste principal de cette suite des Cantos est
un quelconque loup solitaire, bourru, qui agit aux frontières du bien et du mal
mais qui n’en a pas moins un grand cœur. Non, Raul Endymion, à part le fait
qu’il se refuse à porter le cruciforme (et oui, celui-ci est présent deux cent
ans après la chute), n’a rien d’un rebelle, bien au contraire, et surtout, rien
d’un héros, mais alors là, rien du tout… et justement, c’est cela qui le rend
si spécial. Oui, Raul, c’est vous, c’est nous, c’est un mec banal, pas
forcément plus sportif, résistant, courageux ou héroïque que la moyenne et qui
se retrouve, contre son gré, embarquer dans l’une des plus extraordinaires et
improbables quêtes qu’il m’ait été donné de lire dans une œuvre du genre, et
justement, le fait que ce soit un homme banal, qui va en baver, qui va
commettre des erreurs et qui va sacrément dérouiller au fil des pages le rend
tellement plus humain et attachant que bon nombre de soit disant « héros » auquel
on est habitués dans d’autres œuvres que l’on ne peut que s’en réjouir. Et si,
quelque part, c’était déjà un peu le cas dans les Cantos avec
les pèlerins du Gritche (franchement, à part le Colonel Kassad, on ne peut pas
dire que les autres brillaient vraiment de part d’éventuelles qualités
héroïques, du moins, dans le sens habituel du terme), Simmons, ici, va encore
plus loin dans son idée surtout que, comme ici, le récit est écrit à la
première personne, l’identification avec le narrateur – Raul Endymion donc –
est encore plus forte ce qui renforce sans nul doute l’immersion dans
l’intrigue. Une intrigue, justement, fascinante, et pourtant, j’en conviens, il
ne se passe pas grand-chose de franchement exceptionnel en soit puisque,
quasiment tout au long du récit, nos héros se contentent de fuir leurs
poursuivants sur un… radeau ! Mais le contexte, l’univers, les
protagonistes, tous d’une richesse incroyable, font que cela fonctionne de la
plus superbe des façons et, sans trop en dévoiler afin de ne pas gâcher le
plaisir de la découverte a ceux qui souhaiteraient découvrir cette œuvre, dans
un monde où, désormais et par le biais du cruciforme, l’Eglise, autrefois
moribonde, domine littéralement les anciennes planètes de l’Hégémonie, imposant
sa loi, dans un monde où, désormais, les humains ont acquis une
semi-immortalité, un danger menace, et ce danger, c’est Énée ; du moins,
pour l’Eglise. Pour quelle raison, quels sont les enjeux, les forces en
présence, cela, je vous le laisse découvrir par vous-même, mais sincèrement,
j’ai été conquis à la fois par le récit – et oui, un voyage en radeau peut être
passionnant au possible – l’univers, les nouveaux protagonistes – dont mon
préféré, le Père Capitaine De Soya, soldat de la Pax, force armée du Vatican –
les nombreux sous-entendus, révélations et coup de théâtre qui jalonnent
l’intrigue ainsi que, bien évidemment, le coté religieux omniprésent tout au
long des six cent et quelques pages qui composent Endymion. Et si,
aux yeux de certains, cette suite est inférieure aux Cantos et
était dispensable, personnellement, je la trouve certes différente, mais tout
bonnement aussi bonne et indispensable !
Points
Positifs :
-
Donner une suivre à un chef d’œuvre est chose toujours risquée et le résultat
est souvent une déception. Dans le cas présent, il est évident que Dan Simmons
réussit parfaitement son pari, livrant une suite crédible et qui apporte un
plus indéniable aux Cantos D’Hypérion.
-
Le plaisir, indéniable, de retrouver un univers, des protagonistes, qui nous
avaient tellement enchantés dans les deux premiers romans. Certains de ces
derniers sont, curieusement, encore en vie et on apprend ce qui est arrivée aux
autres. Quand aux nouveaux protagonistes, disons qu’ils sont à la hauteur de
nos attentes pour les principaux.
-
Trois protagonistes sortent nettement du lot : Raul Endymion, bien sur,
antihéros par excellence et type tellement banal qu’il est très facile de s’identifier
a lui, Enée, jeune enfant destinée a devenir la messie et, particulièrement, le
Père Capitaine de Soya, leur principal antagoniste dans ce roman et personnage
complexe et d’une profondeur peu commune.
-
Même s’il ne se passe pas grand-chose dans ce roman – nos héros passent
quasiment tout leur temps à fuir les forces de la Pax, le plus souvent en
radeau – force est de constater que Dan Simmons réussit à rendre son récit
passionnant !
-
Bien évidement, l’une des thématiques majeures de ce roman est la religion –
Catholique, bien entendu mais le message est commun a toutes les croyances
humaines – est a la place qu’elle occupe au sein de l’humanité.
Points Négatifs :
-
Certains regretterons que Dan Simmons ait céder a la facilité en pondant une suite
aux Cantos D’Hypérion. Il faut dire que son œuvre se suffisait à
elle-même et que, aussi sympathique ou intéressante soit cette suite, on ne
peut pas vraiment dire qu’elle soit absolument indispensable.
-
En toute franchise, il ne se passe pas grand-chose dans ce roman : après
tout, notre groupe de héros passent quasiment tout leur temps à fuir en radeau…
Cela peut donc ennuyer certains lecteurs.
-
Curieusement, le personnage le plus réussit est le Père Capitaine De Soya.
Ma note : 8,5/10
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